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Trauma : le Projet Manuscrit de CroKool

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Trauma : le Projet Manuscrit de CroKool Empty Trauma : le Projet Manuscrit de CroKool

Message  CroKool and the Gang Jeu 5 Juin - 23:33

Chapitre I ~~ Se réveiller






Une légère brise soufflait entre les feuilles aux couleurs de l'automne qui voilaient le ciel. Formant un dôme impénétrable, les arbres règnaient en maîtres sur tout ce qui vivait sous leurs branchages. L'air était empli d'humidité, et une suffocante chaleur pesait au niveau du sol. C'est dans ce cadre que je retrouvais mes esprits.


J'étais face contre terre, des brindilles plantées dans les cheveux, de la terre sous les ongles, une entaille superficielle (à en juger par le peu de douleur qu'elle provoquait) sur la tempe gauche, incapable de me souvenir de quoi que ce soit. M'appuyant sur les coudes, je m'accroupis et observais alentour. J'étais dans une petite clairière aux teints flamboyants, tapissée de feuilles chues, où seul le crissement du vent dans les buissons se faisait entendre. Une épaisse brume m'empêchait de voir bien loin. Je levais les yeux et constatais qu'il n'y avait que de fins capillaires de soleil qui parvenaient à traverser la voûte sylvestre, expliquant la pénombre ambiante.


Comment avais-je atterri ici ?


Pas une seconde précédant mon réveil ne me revenait en tête. Je restais assis de longues minutes, faisant le vide en moi, cherchant à débusquer le moindre élément qui pourrait m'expliquer ce que je faisais allongé et blessé au milieu d'un bois. En vain. Peut-être que ma perte de mémoire était momentanée. Du moins je l'espérais. En attendant, je décidais de me sortir de cette forêt. J'ignorais combien de temps j'étais resté inconscient, et je redoutais que la nuit tombe.


Une vive douleur éclata dans ma cheville lorsque je me mis debout. Je vacillais et m'écroulais, incapable de supporter mon propre poids. M'étais-je brisé la jambe ? Il n'y avait pas de sang sur mon pantalon, ce qui excluait une fracture ouverte. Précautionneusement, j'enlevais ma chaussure, puis ma chaussette. Du pouce, je palpais chaque partie de mon mollet, puis de mon pied, afin de savoir d'où provenait exactement la douleur. Toute la zone de la cheville était enflée, et l'effleurer me lancinait. C'était probablement une entorse. Peut-être plus... Je préférais ne pas y penser, et cherchais un assez grand bâton à portée de bras qui puisse me servir de béquille. Une fois trouvée, appuyé dessus, je me levais, ne posant pas mon membre souffrant. Ma marche allait être lente, mais il fallait que je sorte de cette forêt avant la nuit.


La clairière n'offrait qu'un seul sentier pratiquable dans mon état. Je l'empruntais péniblement, craignant que ma béquille de fortune se rompe. Les arbres filtraient de moins en moins la lumière au fur et à mesure que j'avançais, et les quelques rayons survivants apportaient une couleur crépusculaire. Mes craintes prenaient forme : le voile nocturne allait tomber d'ici peu. Et devant moi, toujours le même décor, des arbres sur les deux côtés du chemin, oppressants soldats au garde-à-vous épaule contre épaule, ne me laissant pas d'autre choix que d'avancer. Avancer sans savoir jusqu'où, sans savoir combien de temps, sans savoir vers quoi. Je commençais à paniquer, l'obscurité se faisant sentir de plus en plus. L'atmosphère elle-même participait à cette panique, perdant des degrés, me lançant à chaque souffle d'horribles frissons, faisant couler sur moi une lourde sueur froide. Il fallait impérativement que je me calme et que je me concentre sur mes pas. Je commençais à reprendre le contrôle de mon esprit quand un grognement bestial me parvint de devant moi, amplissant mon cerveau d'un ennemi appellé la peur.


Un grognement digne d'une bête enragée, prête à bondir, prête à enfoncer ses crocs jaunis dans la gorge de sa proie. Mon corps se figea, tétanisé, n'osant affronter ce qui se tenait à quelques pas devant. Un loup, un sanglier, un ours... Quoi que cela puisse être, c'était dangereux, et ce seul mot suffisait à doubler mon rythme cardiaque en ce bois. Et si c'était autre chose ? Une créature atroce, à la gueule débordant de bave et de sang, aux yeux dépourvus de pitié... Je délirais, il n'y avait rien devant moi, la panique me jouait un sale tour, il fallait que je garde mon sang froid.

J'avançais, prêt à affronter ce qui se tenait ou pas en face, véritable bête affamée ou simple fruit de mon imagination. Je stoppais ma marche et ramassais une petite pierre. Je tendis le bras, et avec un mouvement de fronde je propulsais la pierre en avant. Un glapissement me paralysa. J'avais touché quelque chose. Puis vint comme un grattement, un grattement de griffes sur le sol. Le grognement reprit de plus belle, se rapprochant lentement. Je discernais alors dans l'obscurité maintenant quasi-totale deux fentes rougeoyantes. Comme les yeux d'un monstre. Les yeux du monstre qui grognait. Et le monstre bondit.


A peine sa silhouette était devenue visible que la bête disparût dans les airs pour une seconde plus tard me plaquer à terre. Dans un réflexe d'auto-défense, je saisis mon bâton et le tendis des deux mains devant moi, comme une barre de protection. Ce qui semblait être un loup aux dimensions monstrueuses claqua ses mâchoires puantes juste au-dessus de mon nez, retenu par mon bâton qui le bloquait au cou. Je maintenais tant bien que mal cette posture, priant intérieurement pour que ni mes bras ni ma défense ne plie, aspergé de salive gluante, le regard absorbé par les globes oculaires enragés de la bête. Ses pattes griffues taillaient mes épaules, sa queue fouettait l'air dans un va-et-vient cyclonique. Les muscles de mes bras tendus, je repoussais d'un coup l'affamé en arrière. Celui-ci roula et se rétablit en une fraction de seconde. Il s'apprêtait à attaquer quand son bassin entier vola en éclats sanguinolents, au moment même où une terrible détonation retentit. Déchiré en deux, le loup s'écroula, la langue pendue, se vidant de ses entrailles. J'étais tellement abasourdi que la touffe de poils visqueuse qui avait giclé sur mon visage m'était passée inaperçue.


J'haletais, immobile, ne comprenant rien à ce qui venait d'arriver à mon bestial assaillant. Un rire sonore et gras m'extirpa de mon hébétitude. Un homme se tenait sur le bord du sentier, derrière un buisson à ma gauche. Il était immense, et sa largeur était en adéquation avec sa taille. Son imposante carrure faisait que ses épaules touchaient les branches sur les côtés du sentier. Je ne distingais pas son visage, dissimulé par une barbe hirsute. Habillé d'une tenue militaire grise, il se fondait presque entièrement dans la pénombre. Il me tendit une main. Je la saisis et il me releva d'une forte traction, et m'adossa à un arbre. Il me regarda, longuement. Il avait une aura tellement menaçante que je détournais les yeux et fixais le loup à l'agonie. L'homme se dirigea ensuite vers la bête, s'accroupit près d'elle, et prit sa gueule dans une main. La bête couinait de douleur, sentant sa fin proche. Peut-être que l'homme agit par compassion. Mais ce que je vécus dans les instants suivants ne me laissent penser qu'à une raison : la cruauté. Les cinqs énormes doigts entouraient le crâne du loup. Celui-ci retint tout cri, tout gémissement. Un craquement sonore, puis le bruit de quelque chose d'organique que l'on écrase, me parvinrent aux oreilles. L'homme se retourna, et me tendit pour la seconde fois sa main : elle dégoulinait de sang et de matière encéphalique.


J'eus un hoquet de terreur. Il se releva, et prit à deux mains un fusil de chasse que je n'avais pas vu depuis son apparition. C'était donc ça qui avait provoqué l'explosion du loup. Il rechargea le canon, et d'un claquement sec, le pointa vers moi.


Des gouttelettes d'eau s'écrasaient sur mon front. Inconsciemment, je levais la tête. Il pleuvait. Un roulement de tonnerre gronda au-dessus des arbres. Le vent se mit à souffler, éventrant la voûte feuillue. Un éclair déchira les cieux avec fracas, illuminant le temps d'un autre hoquet le chemin où j'errais. Le visage du chasseur m'apparût fugacement. Une noire et épaisse barbe dévorait la partie basse de sa tête. Un sourire carnassier s'en extirpait, prévenant de la folie de son porteur. Ses cheveux, à l'origine en bataille, collaient sur son front et sur ses joues taillés au silex. Ses yeux, aux iris bleutés, étaient les parfaits ambassadeurs d'une cruauté pure. Une cruauté qui, alliée au fusil de chasse tenu fermement, ne pouvait annoncer que le pire pour moi.


Le fusil me poignardait tant il m'oppressait. Le chasseur maintenait son regard sur moi. Sa bouche s'ouvrit, et des mots que je ne connaissais pas s'en échappèrent. Une langue étrangère, aux sonorités brutales et impératives, comme si ceux qui la pratiquait la pratiquait uniquement pour imposer leur force, ou pour dompter. Il bougea le canon de moi au chemin vivement, le visage agacé. Il réitéra son geste, de plus en plus énervé. Il lâcha un soupir, puis me saisit par le bras et me jeta à terre, à côté de mon bâton. Il me fixa, pointa son doigt sur moi, et ensuite sur le chemin. Je compris.


Je me relevais lentement, et commençais à avancer à tâtons, essayant de ne pas glisser sur la terre devenue boue. Tandis que je marchais, j'entendais encore l'homme me lancer des mots, à intervalles réguliers. Eins. Je ne comprenais pas, j'étais la proie d'un fou armé qui me demandait des choses dans une langue que je ne parlais pas. Zwei. Je m'éloignais en hâte, espérant que l'obscurité me dissimulerait à ce traqueur sorti de nulle part. Drei. Pourquoi ne me suivait-il pas ? Qu'attendait-il ? Vier. Et qu'est-ce qu'il voulait me dire ? Fünf. Tout devint clair dans ma tête. Sechs. Chaque mot qu'il disait... Sieben... Faisait partie d'un compte-à-rebours... Acht... Avant qu'il ne se lance... Neun... A ma poursuite !


Zehn.


Un tronc à ma gauche explosa au moment où un coup de feu retentit. Un rire sardonique fusa du chasseur dément à mes tympans. Et il se lança à mes trousses. Chacun de ses pas résonnait comme un tocsin. Tandis que je boitaîs pitoyablement, il courait. Je n'avais aucune chance. Je devais me cacher. Un rapide tour d'horizon me dévoila une fosse à ma droite, peu profonde. Porté par l'effroi, je m'y jettais et me couvrais de tout ce que je pouvais. J'amenais à moi feuilles, brindilles, branches, boue, pour me constituer un camouflage. Un autre coup de feu arracha à l'endroit où je me trouvais quelques secondes auparavant une pelletée de terre. Je me couvrais, puis me tapis, et cessais de respirer. Je le sentais proche. Il se tenait à moins d'un mètre. A travers une fine feuille, je vis le canon du fusil balayer l'air lentement. Les secondes ne voulaient pas s'écouler. Le chasseur stagnait, il savait que j'étais là, mais il ne me voyait pas. Il posa un pied à quelques centimètres de ma main. Il pointa son fusil vers le sol. S'il tirait, mon épaule disparaîtrait dans le crachat de flammes de l'arme.


Je me redressais d'un coup, éparpillant les débris forestiers qui me couvraient, et empoignait le bout du canon. De toutes mes forces, je le poussais, tentant de déséquilibrer mon adversaire. Celui-ci tira par réflexe. La langue de feu fouetta l'air et se volatilisa tandis que le plomb se perdait dans la terre. Le chasseur tomba sur le côté, le visage près de mon pied valide. J'abattis ma chaussure sur son nez que j'entendis clairement craquer. Il hurla, plus de rage que de douleur, et me saisit par la jambe. Il se releva et me souleva d'une main. J'avais la tête en bas. Il me fixa, et l'expression de colère qu'il arborait se mua en un sourire diabolique. Il fit alors glisser le bout de son arme contre mon crâne, retraçant ses contours comme s'il avait un crayon. Il s'arrêta lorsque les embouchures des cylindres m'embrassèrent. Ses yeux rayonnaient d'une démencielle cruauté. Son index massait la détente. Il savourait ce moment.


Je tendis vivement les bras vers l'arme et la pointait en l'air. Son doigt pressa la détente, et la lumière de la détonation offrit un instantané charnel. Le bras qui me tenait était sectionné au niveau du coude, coude qui était mû en un feu d'artifices de chair et de bouts d'os. Des gerbes de sang pleuvaient, le chasseur tentant vainement de contenir le flot avec son autre main. Il hurlait de douleur. Je tombais, et regardait l'homme amputé. Son avant-bras baignait dans une flaque de pluie et de sang, encore agité de spasmes. Le fusil était encore dans les airs. Avant même qu'il n'atterrisse au sol, le chasseur courait dans la forêt, je ne sais où, proférant ce que je pensais être des insultes à mon égard. Je ne pus toutefois me relever : quand le canon du fusil toucha le sol, sa crosse s'abattit sur moi, et je sombrais à nouveau dans l'inconscience.
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